2° dimanche de Pâques.
Fête de la Divine Miséricorde
Quelques
temps après avoir fait une longue marche en montagne, en famille ou
avec des amis, on est heureux de se retrouver pour reparler de cette
journée. On regarde la carte, les photos, on se reparle des
difficultés, du paysage extraordinaire découvert, des conversations, de
tous ces moments partagés.
Après un moment fort dans une famille, un
mariage ou une sépulture. Ou après un rassemblement en association, un
pèlerinage en Eglise, on est heureux de se retrouver pour cette
relecture des moments forts passés ensemble.
Je vous propose de faire un peu la même chose après ce Carême et ces fêtes de Pâques que nous venons de vivre.
Ensemble
nous avons fait des rencontres : la samaritaine, l’aveugle-né, Lazare
et ses sœurs. Nous avons marché dans le désert et adoré Jésus
Transfiguré. Nous avons célébré le Christ, Agneau pascal et
Seigneur-serviteur. Nous l’avons accompagné pendant sa Passion, ici
même dans cette Eglise et nous l’avons chanté dans sa victoire sur la
Mort, dimanche dernier.
Le Pape Jean-Paul II a proposé que chaque
année ce 2° dimanche de Pâques, aujourd’hui, soit institué la fête de
la « Divine Miséricorde ». Ne trouvez vous pas que cela prend bien sa
place dans ce chemin de relecture ?
Le 30 avril 2000,
Jean-Paul II canonisait Sœur Faustine Kowalska, religieuse polonaise,
morte à 33 ans de la tuberculose, et dont toute la vie fut remplie
d'humbles tâches, d'abord dans la ferme de ses parents, puis chez les
Sœurs de Notre-Dame de-la-Miséricorde.
Derrière cette
existence ordinaire, se cachait une vie mystique intense, marquée par
de nombreuses apparitions de Jésus, qui s'est montré à elle comme la
source de la Miséricorde. «L'humanité n'aura de paix, lui a-t-Il dit,
que lorsqu'elle s'adressera avec confiance à la divine Miséricorde.»
Quel est donc le sens de ce mot « Miséricorde » ?
En
français nous pourrions dire « sensibilité à la misère d’autrui » ou «
pitié par laquelle on pardonne au coupable » (1). Mais en hébreu cela
vient du mot pluriel Rahămîm, qui veut dire « entrailles ». « Est-ce
qu'une femme peut oublier son petit enfant, ne pas chérir le fils de
ses entrailles ? Même si elle pouvait l'oublier, moi, je ne t'oublierai
pas » nous dit Dieu par la bouche d’Isaïe.
Cela exprime l’attachement de Dieu à l’homme.
Un
autre mot hébreu a une signification encore plus vaste : bienveillance,
pitié, grâce de Dieu envers l’homme. (2) On pourrait dire que la
Miséricorde c’est « l’amour inconditionnel de Dieu, la façon
d’aimer de Dieu » selon une formule de l’archevêque de Lyon. «
L’amour inconditionnel de Dieu, la façon d’aimer de Dieu ».
Devant notre misère, non seulement Dieu ne se détourne pas, mais Il est pris de compassion.
Le
péché ne Le dissuade pas de nous aimer, au contraire : «Là où le péché
a abondé, la grâce a surabondé» (3) C'est au moment où son peuple L'a
rejeté en adorant le veau d'or qu'il s'est révélé à lui comme «Dieu de
tendresse et pitié, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité»
(4).
Tout au long de l'Ancien Testament, Il se montre
saisi de compassion devant la misère du pécheur qui crie vers Lui :
«Mon cœur en moi se retourne, toutes mes entrailles frémissent. Je ne
donnerai pas cours à l'ardeur de ma colère». (5) Et le psalmiste de
chanter : «Béni le Seigneur, ô mon âme, n'oublie aucun de ses bienfaits
! Car Il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ;
Il réclame ta vie à la tombe et te couronne d'amour et de tendresse» (6)
Quant à Jésus, Il ne cesse de répéter qu'il est venu pour chercher et
sauver ce qui était perdu : «Il y aura plus de joie dans le Ciel pour
un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui
n'ont pas besoin de repentir» (7).
Nous n'osons y croire, parce que cela nous semble trop beau pour être
vrai. Nous n'osons pas admettre que Dieu nous aime à ce point. Il faut
la pureté de cœur d'une Thérèse de Lisieux pour affirmer sans
hésitation que, face à la miséricorde de Dieu, tous les crimes du monde
sont «comme une goutte d'eau dans un brasier ardent».
Dieu a des trésors de miséricorde à nous donner et nous n'en voulons
pas, par peur, par orgueil ou par manque de Foi. Il suscite donc des
messagers de sa miséricorde, comme pour supplier les hommes de ne pas
rester prisonniers de leurs péchés : «Ma Miséricorde est plus grande
que ta misère et celle du monde entier, explique Jésus à Sœur Faustine.
Je ne rejette jamais un cœur humble» (8).
Et pourtant Jésus n'a
cessé de nous dire cet Amour de Dieu pour chacun d'entre nous. Par des
paraboles: L’enfant prodigue et le fils aîné qui ne comprends pas. La
brebis perdue qui a tant de valeur aux yeux du bon berger. Mais aussi
la parabole du pharisien et du publicain. Le pharisien qui obéît
strictement à la Loi qui se croit supérieur et sauvé et le publicain
qui se reconnaît pécheur et qui se croit perdu.
C'est la première
clé pour comprendre cet Amour de Dieu pour chacun de nous : savoir se
reconnaître dépendant d'un Dieu dont la justice est parfois difficile à
comprendre mais qui ne veut qu'une chose : notre bonheur.
Et Jésus n'a cessé de vivre pour nous montrer cet Amour de Dieu.
Si
Il était arrivé tout nimbé de gloire, entouré d’anges sonnant de la
trompette pour dire Dieu vous aime, convertissez vous ! L’aurions nous
écouté ?
Il a choisi de prendre notre condition humaine, de naître,
de vivre à nos cotés, de partager tout : les fêtes, les deuils, les
joies, les peines et le quotidien ordinaire. Il a choisi d’aller
jusqu’à la mort pour rester fidèle. Il aurait pu descendre de la Croix
ou nous dire « Ca suffit, je ne veux pas souffrir, après tout je suis
Dieu ! » Mais on aurait pensé qu’Il nous jouait la comédie !
Il a
été jusqu’au bout pour nous dire dans le creux de notre cœur : là où tu
vis, là où tu souffres, là où tu ris, je suis avec toi, toujours, parce
que je t’aime ! Et il nous invite à faire de même :
« Tout ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites le aussi pour eux »
« Bienheureux les miséricordieux, ils obtiendront miséricorde. »
« Aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous persécutent. »
« Je ne vous dis pas de pardonner sept fois, mais soixante dix sept fois sept fois. »
Relisez
la parabole du Bon Samaritain : Jésus redit à notre cœur ce que nous
savons : que la bonté, l’amour sont inscrits au plus profond de nous.
Nous le savons et cela nous rend heureux.
Mais nous savons bien en
tant que parents ou grands parents que nous voulons donner tout l’amour
dont nous sommes capables pour nos enfants. Et le résultat n’est pas
toujours celui que l’on avait imaginé.
Alors avec Saint Paul nous
pensons souvent: « je ne comprends pas ce que j'accomplis, car ce que
je voudrais faire, ce n'est pas ce que je réalise ; mais ce que je
déteste, c'est cela que je fais. »
Nous trouvons que Jésus nous
demande de faire des choses impossibles. Pardonner, c'est un mot facile
à lire dans une belle phrase. Mais dans la vie de tous les jours, nous
avons du mal. C'est difficile d'aimer comme Dieu aime.
Alors
aujourd’hui regardons Thomas, qui a vécu toute la montée à Jérusalem
aux cotés de Jésus. Lui qui voulait « mourir avec Lui ! »(9)Il croyait
aussi que Jésus allait changer la face du monde et devant son Seigneur
cloué sur la Croix, le cœur transpercé par une lance, il s’enfuit avec
les autres.
Il lui faut relire tout ce qu’il à vécu pendant ces mois
à suivre Jésus, Après ces derniers jours de folie et de violence.
Comprendre avec le cœur ce que son esprit ne veut pas entendre : Jésus
est ressuscité. Il est mort. Et il est revenu de la mort : il nous
montre le chemin. Il est passé le premier, jusqu‘au bout pour nous
montrer que sa fidélité et son amour pour nous vont jusque là.
Comme
Marie Madeleine reconnaissant Jésus au matin de Pâques s’écrie «
Rabbouni ! » C’est au tour de Thomas de le reconnaître : c’est bien le
même Jésus. Il ne nous a pas raconté d’histoire. Il a accepté de mourir
pour nous et Il est vivant pour toujours ! « Mon Seigneur et mon
Dieu ».
Quel acte de Foi ! « Mon Seigneur et mon Dieu ». Et
nous aussi, quand nous voyons l’hostie, Corps de Jésus mort et
ressuscité, nous pouvons dire : « Mon Seigneur et mon Dieu ».
Sœur
Faustine a peint un tableau d’une de ses visions de Jésus. Deux rayons
lumineux sortent de son cœur, le cœur siège de l’Amour de Dieu pour
nous ; cet Amour que Jésus voudrait voir éclairer tous les recoins de
nos vies. Au dessous de ce tableau, elle y a inscrit sur les
recommandations de Jésus :
« Jésus j’ai confiance en toi ». « Mon Seigneur et mon Dieu ».
N'aie pas peur, Laisse-toi regarder par le Christ, Laisse-toi regarder Car il t'aime!
Château-Thébaud
30 Mars2008 Philippe ARRIVE
(1)
(2)Dictionnaire encyclopèdique de la Bible, (3) Romains 5, 20. (4)
Exode 34, 6. (5) Osée 11,8. (6) Psaume 102,2-4. (7) Luc 15, 7. (8)
Petit Journal de Sœur Faustine, p. 1485.(9) Jn 11,
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