4° dimanche de l'Avent.
Nous
avons médité, tout au long de ces 4 dimanches de l’Avent, d’abord sur
la vigilance : rester éveillés, nous tenir prêts à accueillir
celui qui vient. Lors du deuxième dimanche de l’avent, nous avons
médité sur la patience : prendre le temps de préparer notre cœur à
la venue de Jésus parmi nous ; puis, dimanche dernier, sur la joie
que nous procure cette venue. La liturgie nous propose aujourd’hui de
nous arrêter sur le mot alliance. En ce temps de préparation à Noël,
nous nous rappelons que Dieu fait alliance avec nous, et avec toute
l’humanité. « Il ne nous abandonnera jamais, quelles que soient
les difficultés que nous traverserons », avons-nous dit au tout
début de cette célébration.
Dieu fait alliance avec nous.
Incroyable ! Nous, chrétiens, nous ne croyons pas en un de ces
dieux païens, tyranniques, capricieux, qui ont placé l’homme au service
de leurs bons plaisirs, ces divinités qui menacent l’homme de tous les
dangers s’il ne les sert pas comme il se doit. Non, nous croyons en un
Dieu qui vient faire alliance avec toute l’humanité ! c’est tout
de même extraordinaire ! Et il vient, non pas dans un éclair de
feu, comme un souverain tout puissant qui s’imposerait à nous. Il vient
dans la fragilité d’un tout petit, d’un bébé, pour partager notre
condition d’homme, du début à la fin d’une vraie vie d’homme.
Oui, c’est en ce Dieu-là que nous croyons. Et si nous y croyons, ce
n’est pas comme on croit au Père Noël, ou comme à une belle légende qui
nous ferait rêver. Nous y croyons parce que Dieu lui-même nous l’a
révélé. En nous envoyant son fils, il se révèle à nous, en s’incarnant
dans notre histoire, à travers les actes et les paroles de Jésus, à
travers sa vie tout entière, en commençant par une naissance. Une
naissance pour sceller une alliance, la Nouvelle Alliance, définitive,
de Dieu avec son peuple. Avec les fiancés, lors de nos rencontres pour
préparer leur mariage, il est souvent, évidemment, question d’alliance.
Pour eux, l’alliance, c’est d’abord cet anneau qu’ils se passeront au
doigt, l’un à l’autre, juste après avoir été unis par le sacrement de
mariage. Cet anneau est pour eux le signe de leur engagement. Et en
cheminant avec eux, nous essayons de leur faire découvrir que cet
engagement, cette alliance qu’ils concluent, revêt quatre dimensions
fondamentales : leur alliance est indissoluble, c’est-à-dire
qu’elle est scellée pour la vie ; elle suppose une volonté commune
de fidélité ; elle n’est possible que dans la liberté de
chacun ; elle doit être tendue vers une fécondité.
Indissolubilité, fidélité, liberté, fécondité. C’est ce qu’on appelle
les quatre piliers du mariage chrétien. Eh bien, l’alliance que Dieu
scelle avec son peuple, l’alliance que Dieu passe au doigt de
l’humanité, elle a aussi ces quatre caractéristiques
fondamentales : Elle est indissoluble, et n’aura pas de fin. Elle
est fidélité, et même s’il nous arrive, à nous, pauvres pécheurs,
d’être infidèles, Dieu, lui, nous reste fidèle à jamais. Elle est
liberté. Dieu vient comme un petit bébé, il ne s’impose pas à nous,
nous pouvons choisir librement de l’accueillir ou de le rejeter. Et
elle est fécondité, car Dieu nous donne la vie en abondance, et nous
fait cette grâce inouïe de pouvoir la transmettre autour de nous, si
nous le voulons.
Dieu fait alliance avec son peuple. Bien des
prophètes, plusieurs siècles plus tôt, l’avaient déjà annoncé :
« C’est de la maison de David que naîtra le Messie, le
Sauveur ». Et ces prophéties se sont réalisées à Noël. Pourtant, à
bien lire le passage d’évangile d’aujourd’hui, on pourrait se dire que
tout n’avait pas trop bien commencé :
« Joseph, fils de
David ! ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton
épouse ! » Pas facile, pour cet homme qui nous est présenté
comme juste – c’est-à-dire ajusté à la parole de Dieu – pas facile
d’accepter la situation qui se présente à lui. Quel scandale !
rendez-vous compte : voilà que celle qui lui était promise est
enceinte ! Quelle humiliation ! la coutume et les traditions
de son pays proposent à joseph de répudier Marie, afin de se soustraire
lui-même au scandale. Mais alors, pour Marie, le sort promis est la
lapidation, la mort. Pour Joseph, quel dilemme ! être, toute sa
vie durant, le sujet de moqueries, ou voir sa promise lapidée ! En
homme sage et juste, et certainement avec une grande tristesse, il
avait donc décidé de répudier Marie, mais en secret. Ainsi, elle ne
serait pas dénoncée publiquement. L’honneur de Joseph serait préservé,
ainsi que la vie de Marie. Oui, se dit Joseph, voilà une solution qui
convient. Joseph nous apparaît ici plein d’humanité. Mais, pour sage et
juste qu’elle soit, aux yeux des hommes, cette solution ne convient pas
du tout à Dieu ! L’enfant que porte Marie, c’est son fils, celui
qui sera reconnu comme le Christ, le Messie que tout le peuple attend.
L’incarnation de cette alliance qu’il veut renouveler avec l’humanité.
Cette alliance, elle ne peut se manifester dans la mésalliance entre un
homme et une femme, ni dans la honte, dans la dissimulation, mais au
contraire elle doit apparaître au grand jour. Pour son fils, Dieu a un
projet beaucoup plus grand, beaucoup plus beau que ce que Joseph ne
pourrait proposer. C’est pourquoi il lui demande rien moins que
d’adopter son fils. Et ce qui n’est pas moins extraordinaire, c’est que
Joseph accepte la proposition de Dieu. Joseph fait confiance à Dieu,
même s’il ne comprend sans doute pas très bien, et s’il ne perçoit pas
toutes les conséquences de son « oui ». Joseph prendra donc
Marie comme sa véritable épouse. Joseph, fils de David, descendant
direct de la famille royale. C’est de cette lignée que doit
sortir le Messie. Ce Messie, il doit avoir un nom. Dans la
tradition orientale, c’est au père et à lui seul qu’il revient de
donner le nom à l’enfant. Dieu, par son messager, dit à
Joseph : « Marie mettra au monde un fils, auquel TU donneras
le nom de Jésus. » Ainsi, Dieu établit pleinement Joseph dans sa
dignité de père, et en même temps dans son rôle social de père. Nous
voyons bien alors que Joseph est un peu plus qu’un simple père de
substitution, un « père nourricier » comme on l’a souvent
écrit. Il est le véritable époux de Marie, et pleinement père de Jésus.
Donner le nom de Jésus à un enfant, en ce temps-là, ça n’avait rien
d’extraordinaire. Les archéologues et autres historiens qui
s’intéressent à cette époque nous rapportent quantité de personnages,
illustres ou inconnus, portant le nom de Jésus, Yeshua ou Yoshua. Le
successeur de Moïse, bien des siècles auparavant, qui fit entrer le
peuple hébreu dans la Terre Promise, portait déjà ce nom, que l’on a
choisi de traduire, pour le différencier, par Josué. Mais ce Jésus-là,
fils de Joseph et de Marie, personne avant lui ni après lui n’a jamais
aussi bien porté son nom : « Le Seigneur sauve ». Son
nom lui-même est une révélation. Jésus est l’incarnation de ce Seigneur
qui sauve. Et en disant « Dieu sauve », on ne dit pas qu’il a
sauvé un petit peuple juif il y a 2000 ans. Il nous sauve aujourd’hui,
comme hier, il sauve l’humanité entière, de toujours à toujours. C’est
le sens de cette alliance. Ce que nous fêtons à Noël, ce n’est pas
l’anniversaire de Jésus. Nous savons bien que la date du 25 décembre
est toute symbolique, en raison de sa proximité avec le solstice
d’hiver, quand les nuits commencent à baisser pour laisser une place de
plus en plus grande à la clarté du jour. Nous ne fêtons pas non plus le
souvenir nostalgique d’un événement passé, il y a bien longtemps. Ce
que nous fêtons, et c’est pourquoi notre cœur est en joie, c’est cette
alliance, à la fois nouvelle et éternelle, alliance manifestée, rendue
visible par la venue de ce petit enfant, de ce tout-petit : Jésus,
fils de Dieu.
Amen !
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